"Angel face" ("Un si doux visage") : la femme fatale et romantique, onirique

Otto Preminger 1952

Note : 3.2/5 (22 notes)

Une ambulance roule la nuit à vive allure sur les hauteurs de Hollywood, appelée en urgence pour une tentative de suicide au gaz. Quand les ambulanciers débarquent dans la maison, Mrs Tremayne, la maîtresse de maison, en a réchappé, un médecin et son mari sont à son chevet. Mais, et c’est bien là l’art de la mise en scène, ce n’est pas la rescapée à l’étage qui est névrosée, comme le spectateur le croit quelques minutes, mais sa belle-fille qui joue du piano au rez-de-chaussée. Sur le chemin de la sortie, Franck Jessup, un des ambulanciers, intrigué par la mélodie, fait la connaissance de Diane Tremayne, 20 ans, au visage d’ange. Elle sanglote sans raisons, il la gifle pour la calmer, elle lui rend sa gifle ! Quelques minutes plus tard, Diane sort en voiture en pleine nuit pour relancer Franck qu’elle retrouve facilement dans un bar proche de l’hôpital où il travaille. Acceptant leur attirance réciproque immédiate, Franck décommande le dîner avec Mary, sa fiancée. Le lendemain, Diane donne rendez-vous pour déjeuner à Mary qu’elle ne connaît pas pour lui dire qu’elle a passé la soirée avec Franck …



Très vite, Diane qui a entendu dès le premier soir que Franck, ancien coureur automobile, désire s’acheter plus tard un garage, lui propose un emploi de chauffeur chez eux et, accessoirement, de trouver auprès de sa riche belle-mère un financement pour son projet. Du jour au lendemain, et cela est montré en deux plans, Franck est engagé chez les Tremayne. Mais, surestimant l’influence qu’elle peut avoir sur Franck avec qui elle a entamé une liaison, Diane abat ses cartes trop rapidement : une nuit, elle va le rejoindre et accuse sa belle-mère d’avoir ouvert le gaz dans sa chambre pendant son sommeil. Franck comprend qu’il est manipulé et que la haine obsessionnelle de Diane pour sa belle-mère lui a mis dans la tête des projets meurtriers auxquels elle voudrait l’associer, il décide de partir…
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"Zabriskie point" : génération peace and love

Antonioni (1970)

Note : 2.8/5 (13 notes)

Film hippie, psychédélique, politique, poétique, road movie désertique filmé de façon somptueuse et hypnotique dans vallée de la mort, ce récit démarrant un peu comme un Godard militant, voire le cinéma vérité d'un Francesco Rosi dénonciateur, et basculant ensuite du coté de Barbet Schroder ("More", "La Vallée") dans la seconde partie, planant sur la musique de Pink Floyd et Grateful dead, est un voyage, un trip sous l’acide des années 70 (fin des 60, début des 70, "Blow up" s'intégrait dans la période précédente du swinging London), époque de tous les excès et toutes les libertés.



On n’oubliera pas de sitôt la fin du film paroxystique, extraordinaire feu d’artifice, explosions à répétition de la villa symbole du monde des affaires, se prolongeant par une succession de tableaux allant de plus en plus vers l’abstraction, ces objets décomposés, ces meubles démembrés, cette société de consommation en mille morceaux flottant dans le ciel et cet écran en feu, il faut le voir et le revoir, on est sidéré, scotché, récompensé d’avoir épousé le rythme Antonionien de la traversée du désert comportant quelques lenteurs plus que des longueurs…

Un jeune homme, témoin de l'assassinat d'un étudiant noir pendant des manif à LA, vole un avion pour échapper à l'accusation d’un meurtre qu’il n’a pas commis. Parallèlement, une jeune fille ravissante en mini-robe verte comme les cactus géants du Nevada, de longs cheveux balayant ses reins, tente, en vadrouillant au volant de sa voiture, d’échapper à une réunion de travail dans un monde qui lui fait horreur. Ces deux-là vont s’aimer physiquement au milieu de l’immensité du désert où ils se sont perdus volontairement. Ce qui explique l’interdiction du film aux moins de 16 ans pour une célèbre scène fantasmée d’orgie où les corps nus parfaits et les cheveux s’entremêlent dans des étreintes très chorégraphiées où l’esthétique prend le pas sur le sensuel livrant ainsi un moment artistique pur.

Pessimiste et contestataire, dénonçant la société de consommation et les oppressions politiques, le film est beaucoup plus violent que la beauté de l’image et la fluidité de l’enchaînement des plans pourraient en laisser l’impression au spectateur, ébloui par la lumière transparente et les images sublimes qui se succèdent avec une perfection jamais prise en défaut. Entre pamphlet social et philosophie peace and love, c’est un film culte entre mille, et sans doute le plus créatif, le plus risqué d’Antonioni, bien qu’il s’intègre parfaitement à une époque de recherche du paradis pour tous sans entraves, de liberté sans tabous, une génération flower power qui ne cesse de nous faire rêver. Un film quasi expérimental, préfigurant sans doute le futur "Profession reporter" (1975).

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"Fallen angel" & notes sur "Whirpool"

Otto Preminger et les Hollywood angels

Note : 2.8/5 (8 notes)

"Fallen angel" ("Crime passionnel") (1945)

Quand Eric Stanton se fait jeter de l’autobus de nuit où, passager clandestin, il n’a pas de quoi payer son billet, il débarque dans un patelin, Milton, petite ville de province. Poussant la porte du café Pop’s, il entend parler d’une certaine Stella qui brille par son absence. Plus tard, Stella débarque et Pop, le patron, dit qu’on fera comme si elle n’était jamais partie, qu’elle va reprendre sa place au bar et son logement. Coup de foudre immédiat pour Eric Staton dès qu’il aperçoit Stella.

© 20th Century Fox
Ne sachant où dormir, Eric Staton s’en va squatter la chambre d’un minable charlatan qui fait la paire avec un soi-disant professeur de spiritisme. Les deux hommes se sont vus interdire l’affichage de leur spectacle de magie par Clara Mills, la fille d’un notable de la ville. Stanton propose alors d’arranger les choses et va rendre visite à la revêche Clara Mills. Reçu tout d’abord vertement, il doit son salut à la blonde sœur de Clara, June Mills qui convainc sa sœur de se rendre au spectacle. Au moment d’emboîter le pas des deux artistes qui partent pour San Francisco, Staton, obsédé par Stella, ne peut se résoudre à quitter Milton, il reste en ville et la demande en mariage. La belle accepte un deal : elle l’épousera quand il aura de l’argent, beaucoup d’argent. Dans l’intervalle, Stella continue à sortir avec des hommes différents tous les soirs qui l’entretiennent. Pris de panique, Stanton frappe un grand coup pour obtenir de l’argent rapidement, il force la main de June et l’épouse en catimini à San Francisco pour vider leur compte et demander ensuite le divorce. Mais Stella le prend mal, elle voulait l’argent mais pas un homme marié, elle rompt.

La rencontre entre Stanton, le voyou, et Stella, la femme de pique, est typique du film noir : deux loosers malhonnêtes, deux escrocs minables, sans scrupules, prêts à tout pour de l’argent facile, qui vont se duper l’un l’autre, un jeu de miroir. Dans ce rôle de femme fatale, Linda Darnell, brune piquante avec fleur blanche piquée dans ses cheveux noirs de jais ; elle tournera aussi Ambre avec Otto Preminger. Dans le rôle de June, Alice Fay, transfuge de la comédie musicale, qui verra sa partition coupée en partie au montage pour mettre le personnage de Stella en valeur à ses dépends. June, la blonde, est aussi fade et angélique que Stella est sexy et venimeuse. Midinette perdue dans ses lectures romantiques, June voit arriver en Stanton un prince charmant qui la délivrera de son tête à tête avec sa soeur, alors que Stella, sans illusions sur les hommes, ne voit en Stanton qu’un pigeon de plus à plumer.

Le problème du film, ce sont des personnages trop typés, trop entiers, sans nuances, Stella très méchante, Stanton très agressif, June très gentille, au point que leur crédibilité est compromise, ça ne passe pas toujours. La manière dont Stanton s’adresse aux deux femmes est assez improbable, le comportement de June est beaucoup trop angélisé, seule Linda Darnell est vraiment comme on l’attend, le prototype de la garce. Par ailleurs, les dialogues sont nombreux et extrêmement bavards, les plans des visages des couples aussi, on filme multe fois les mêmes étreintes pudiques, ça nuit à l’ambiance film noir. On le voit, j’ai été déçue par ce film et aussi par le suivant (le Mystérieux Dr Korvo) qui ne tient pas la comparaison avec des merveilles du film noir, comme "Les Tueurs" de Robert Siodmak ou "Assurance sur la mort" de Billy Wilder, par exemple… En conclusion, les personnages trop stylisés, l’excès de dialogues, une ambiance laissant à désirer avec trop peu de séquences d’images comme celles du début (un bus arrive dans la nuit, on ne voit que le chauffeur de dos, la route devant lui éclairée par les phares, on ne sait pas encore que c’est un autobus, quand le chauffeur stoppe, il se lève et on découvre l’arrière du bus avec les passagers endormis). Un bon film mais pas un film exceptionnel…

"Whirpool" ("Le Mystérieux Dr Korvo") (1949)


La jeune épouse du Dr Sutton, célèbre psychanalyste, est prise en flagrant délit de vol à l’étalage dans un grand magasin. Le directeur du magasin est sur le point de porter plainte quand un mystérieux docteur Korvo la sauve d’un scandale. Mais il ne la lâchera plus, spécialiste de l’hypnose, il lui offre de soigner ses insomnies qu’elle cache à son mari. Gene Tierney, actrice fétiche d’OP dans trois films dont le fameux "Laura" et "Mark Dixon, détective", n’est pas au mieux de sa forme. Bien qu’elle demeure une des plus belles actrices de l’histoire du cinéma, le cheveu mal coupé et la mine peu expressive dans un rôle de névrosée timide, Gene Tierney est trop lisse et le discours psychanalytique sous-tendant le film basique et rabâché, on pouvait s’attendre à mieux avec ce genre de scénario. Gene Tierney dans "Péché mortel" (son meilleur rôle, à mon avis) et "Laura", c’est autre chose…

et les femmes fatales d’Hollywood :

  • Avec Linda Darnell :
    • "Fallen angel" (Crime passionnel) (1945)
    • "Ambre" (1947)
  • Avec Gene Tierney :
    • "Laura" (1944)
    • "Whirpool" ("Le Mystérieux Docteur Korvo") (1949)
    • "Mark Dixon, détective" (1950)
  • Avec Jean Simmons :
    • "Angel face" (1952)
  • Avec Marilyn Monroe :
    • "River of no return" ("Rivière sans retour") (1954)

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